Vous n'avez aucune formation d'architecte. Vous n'avez aucune culture de l'histoire de l'architecture. Et vous voudriez vous avancer devant la plèbe en tant qu'architecte ? Mais, confrères constructeurs, redescendez sur terre.
L'architecture préexiste aux architectes. Ces derniers s'approprient les savoirs constructifs ou esthétiques au fil de l'histoire, mais n'ont pas le monopole de la rationalité en ce qui concerne la construction ou la projection d'espaces.
L'architecture, c'est une vision, des savoirs, des connaissances, des techniques, des contraintes, et j'en passe. L'architecture est un art, un art qui de plus, est souvent mis à disposition des gens de manière pragmatique étant donné sa fonction. Souvent de trop, même, mais il n'est pas donné à tout le monde de pouvoir se payer une œuvre d'art habitable.
De nombreux courants modernes ont compris que l'architecture n'est pas une sculpture habitée comme on tend à penser en te lisant. Il s'agit bien moins d'une chose belle et habitable qu'une chose belle parce qu'elle est habitable (elle est en cela rationnelle). Personne ne devrait être laissé pour cause dans l'accès à une qualité spatiale (cf corbu à l'unité d'habitation de marseille, les projets minimaux des japonais, etc), c'est entre autres le capital qui a recyclé les idées modernes à son avantage, devant l'économie de coût que la sérialisation provoquait. Sauf que dans l'affaire il a zappé les questions de qualité spatiale (ah merde alors, c'était bien là l'essentiel)
Mais vient une autre question, plus vaste, plus épineuse. Que faut-il, pour toi, qu'une personne ai ou maîtrise pour qu'on puisse la considérer comme "Architecte" ? La réponse évidente, immédiate, serait une formation, un cursus, un diplôme même.
Mais aujourd'hui, avec Internet et l'accès quasi-illimité à l'ensemble des connaissances de l'humanité (ce qui fait beaucoup), n'importe qui peut assimiler gratuitement et bien assis sur son fauteuil de bureau n'importe quelle information dans n'importe quel domaine.
Pas d'accord : cf mon début de paragraphe, l'architecture n'est pas aux architectes. On a pas attendu Internet pour que des gens non initialement formés se révèlent des architectes de génie, qu'il s'agisse d'architecture vernaculaire, de process industriels ou d'autodidactes chez les contemporains.
Comme une map de jeu vidéo n'est pas habitée, il ne peut y exister aucune architecture intrinsèque.
Les cas maximaux qui me viennent à l'esprit sont :
-*- Les recherches architecturales (généralement didactiques) menées via le jeu, qui est alors vu comme un outil de projection (l'architecture finale n'a pas plus de valeur que la maquette ou le support de présentation)
-*- L'élaboration, par le biais de références historiques blablabla, de projets graphiques et/ou sensibles non fonctionnels, ce qui se rapproche alors d'une sculpture (interrogeant peut être un peu les notions spatiales quand même) numérique.
Mais ce n'est pas pour autant que les prétendants au rang d'architecte ne le sont pas. Celui qui voit dans la rue, qui s'émeut ou tente de comprendre des mécanismes architectoniques quels qu'ils soient, est plus architecte que le type en bureau d'étude qui oublie les questions fondamentales pour s'auto construire des dogmes sérialisés.
Si notre promeneur dans la lune joue chez lui, et qu'il prétend dans son prolongement virtuel être architecte, peut être qu'il ne le fait pas pour les bonnes raisons (il dira alors : "parce que je construis de belles choses", pas "parce que j'apprends à voir les espaces").
Ça ne lui enlève pas le mérite de ses préoccupations, et lui balancer dans la gueule la négation de ce qu'il peut potentiellement être n'est pas très acceptable. Reléguer les questions d'architecture à une élite formée est très dangereux : ça en ferait l'affaire de spécialistes plus illuminés qu'éclairés, là où elles devraient être celles de tous.