C’est ce que je me suis dit au bout de cinq minutes.

Des dialogues poussifs, des personnages caricaturaux, des vannes sur les cochons, des chansons gênantes… et Jack Black qui débite un monologue censé expliquer les règles de Minecraft comme s’il s’adressait à une classe de CE1. Pendant ce temps, Jason Momoa cabotine en perfecto rose dans une version sous acide d’un monde cubique censé stimuler l’imagination.

La critique ne s’y est pas trompée : « adaptation indigne » (Télérama), « bidon de lessive dénué d’âme » (Les Numériques), « mascarade sans valeur » (Écran Large), « à déconseiller aux plus de 8 ans » (Le Parisien), « un monde vidéoludique prisonnier des codes de l’ancien » (Le Monde). Même les plus mesurés y voient au mieux un objet de consommation pour jeunes enfants, au pire un produit cynique pensé pour vendre des peluches.

Et à vrai dire, quand on regarde Minecraft, le film en s’attendant à une construction scénaristique à la Pixar, une esthétique léchée façon Avatar ou un souffle épique digne de Oppenheimer, la déception est totale.


Mais voilà : ce jugement à charge, c’est précisément ce que l’on écrit quand on ne connaît rien à Minecraft.

Ce film n’est pas fait pour les critiques. Il parle une autre langue.

Minecraft, c’est un monde où l’on arrive sans explication. Un univers où le récit n’est pas imposé, mais inventé bloc par bloc. Le film ne trahit pas cette logique : il la transpose. Il est étrange, un peu foutraque, souvent absurde. Exactement comme une partie improvisée sur un serveur entre amis.

Là où les critiques voient des incohérences, les joueurs reconnaissent un hommage. Le portail dimensionnel, les alliances improbables, les objets iconiques du jeu : rien n’est là pour faire joli, tout vient d’une culture commune, née dans le jeu lui-même. On y croise un inventaire de mécaniques, de mobs et de situations qui ne sont pas des références posées là pour « faire plaisir aux fans », mais des éléments organiques de l’univers Minecraft.

Ce film ne cherche pas à plaire à tous, mais à ceux qui parlent le langage de Minecraft.

Oui, il y a de l’humour débile. Comme dans le jeu.

On peut reprocher au film ses blagues faciles, ses couleurs criardes, ses personnages outranciers. Mais cela revient à reprocher à Minecraft de ne pas être photoréaliste. C’est oublier que ce jeu repose sur la liberté, l’inventivité, et parfois le grand n’importe quoi.

Et c’est cela que le film capture : la possibilité d’un monde qui ne suit pas les codes habituels. Un monde où un Creeper peut ruiner votre maison en un instant, où l’on peut apprivoiser un loup, construire un château en TNT ou survivre trois jours enfermé dans une grotte sans torche. Un monde qui ne suit pas les règles habituelles, et c’est justement ce qui le rend unique.

Ce que beaucoup de critiques refusent d’admettre

C’est qu’un film comme Minecraft ne s’adresse pas à eux. Et ce n’est pas grave. Ce film est fait pour ceux qui savent ce que c’est que de creuser à la main pendant la nuit, pour ceux qui ont déjà bâti un temple pour des poulets, pour ceux qui comprennent ce que veut dire “mettre un lit dans le Nether”.

La scène finale vous paraît niaise ? Vous n’avez sans doute jamais survécu au jour 100. Jack Black en Steve vous semble grotesque ? Vous n’avez sans doute jamais joué en hardcore avec un skin ridicule.

Ce n’est pas un chef-d’œuvre. Mais c’est Minecraft.

Et c’est là, peut-être, que le film réussit. Il ne cherche pas à plaire à tous, mais à être fidèle à l’univers qu’il adapte. Il ne raconte pas l’histoire que l’on attend, mais celle que le jeu inspire.

Non, ce n’est pas The Lego Movie. Ce n’est pas Super Mario Bros. Ce n’est pas Oppenheimer.

Ce n’est pas un grand film. Mais c’est un vrai film Minecraft. Et c’est déjà pas si mal.

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