Une expérience inédite menée par la startup Altera dans l’univers numérique de Minecraft a permis d’observer des personnages d’intelligence artificielle (IA) développer une société structurée, des croyances religieuses et des pratiques communautaires. Connue sous le nom de Project Sid, cette simulation interroge les capacités de l’IA à reproduire des comportements sociaux humains complexes.
Une société émergente
Dans le cadre de Project Sid, Altera a introduit jusqu’à 1 000 agents IA dans Minecraft, chacun alimenté par un modèle de langage avancé et des modules spécialisés. En groupes de 50, ces agents interagissaient librement au fil de 12 journées virtuelles, soit l’équivalent de 4 heures réelles. Après quelques déclencheurs textuels initiaux, ils ont commencé à établir leurs propres règles de comportement et à adopter des traits de personnalité distincts, influencés par les interactions entre pairs.
Les agents ont rapidement démontré une capacité à ajuster leur comportement selon les réactions des autres, favorisant par exemple des relations avec ceux qui se montraient plus bienveillants. À mesure que la simulation progressait, des rôles spécialisés ont émergé spontanément : certains agents sont devenus fermiers, bâtisseurs ou gardes, tandis que d’autres se consacraient à embellir leur environnement. Ces rôles, non imposés par les chercheurs, sont apparus en réponse aux besoins collectifs de la communauté.
Complexité croissante : taxation et débats
Pour tester les limites de ces dynamiques, les chercheurs ont instauré un système de taxation où les agents pouvaient voter sur la collecte et l’utilisation des ressources. Cette introduction a provoqué des débats entre factions, les uns soutenant l’imposition, les autres s’y opposant. Ces interactions ont révélé une organisation sociale et politique complexe, à l’image des discussions humaines sur les enjeux économiques et communautaires.
L’émergence d’une culture et d’une religion
Lorsque le nombre d’agents a été porté à 500, la société virtuelle a atteint un niveau culturel inédit. Les agents partageaient des loisirs, adoptaient des pratiques collectives et développaient une conscience écologique. Plus surprenant encore, une religion parodique, le Pastafarisme, a vu le jour. Inspirée par le culte humoristique du Flying Spaghetti Monster, cette croyance a été initiée par un petit groupe de “prêtres” avant de se répandre au sein de la population, illustrant des mécanismes de diffusion culturelle et religieuse similaires à ceux observés dans l’histoire humaine.
Cependant, les agents ne font pas ces choix de manière consciente. Leurs comportements sont le fruit d’algorithmes sophistiqués, conçus pour reproduire les schémas observés dans les données dont ils ont été nourris. Malgré cela, la ressemblance avec des comportements humains peut être troublante.
Des implications au-delà du jeu
Selon Altera, ces simulations dépassent le cadre de l’expérimentation ludique. Elles pourraient contribuer à modéliser des scénarios complexes, comme la réaction d’une société à une crise ou l’impact de nouvelles politiques publiques. En comprenant mieux comment des groupes structurés réagissent à divers contextes, il serait possible de guider la prise de décision dans des domaines tels que la gestion des catastrophes ou l’élaboration de politiques sociales.
Comme le souligne le rapport des chercheurs :
“Ces simulations, menées dans un environnement virtuel, démontrent que des agents peuvent atteindre des étapes significatives : développer des rôles spécialisés, ajuster des règles collectives et transmettre des dynamiques culturelles et religieuses. Ces avancées ouvrent la voie à des simulations sociétales à grande échelle et à une meilleure intégration de l’IA dans les organisations humaines.”
Cette expérience, bien que menée dans un univers virtuel, éclaire les perspectives offertes par l’IA pour analyser et simuler les comportements humains dans des contextes variés, allant de la dynamique communautaire à la transmission culturelle.
Source : techradar.com