En 2019, Minecraft fête ses dix ans. Microsoft sort le grand jeu : événements en direct, vidéos commémoratives, millions de spectateurs. Et Markus “Notch” Persson ? Nulle part. Pas d’invitation, pas de discours, pas même un clin d’œil discret dans la vidéo d’anniversaire. C’est comme organiser un repas de famille et oublier d’inviter le parent qui a construit la maison.

Et pourtant, sans lui, Minecraft n’existerait pas.

Aux origines d’un mythe

En 2009, Markus Persson code sur son temps libre un petit jeu de construction en blocs. Pas de graphismes réalistes, pas de scénario imposé : juste un monde où vous pouvez construire tout et n’importe quoi. Résultat ? L’engouement explose. Cinq ans plus tard, plus de 50 millions d’exemplaires vendus. Le nom “Notch” devient une marque en soi, celui du génie solitaire en hoodie qui a bouleversé le jeu vidéo indépendant. À ce stade, il n’est pas juste un créateur : il est le visage public d’un phénomène culturel.

Le jackpot et la sortie de scène

Puis arrive 2014. Coup de théâtre : Notch vend Mojang et Minecraft à Microsoft pour 2,5 milliards de dollars. C’est le genre de transaction qui change une vie… et qui ferme définitivement la porte du bureau.

Il refuse de rejoindre Microsoft et part vivre la vie d’un milliardaire excentrique : villa à 70 millions de dollars à Beverly Hills, soirées où défilent célébrités et influenceurs, voyages à répétition. Mais les réseaux sociaux ne tardent pas à montrer ce que la presse people ne voit pas : un sentiment d’isolement, de rejet par ses anciens collègues, et un vide que l’argent ne comble pas.

Du héros au troll de Twitter

C’est là que la pente devient glissante. Notch se met à tweeter… beaucoup. En 2017, il qualifie le féminisme de “maladie sociale” (oui, c’est bien ce qu’il a écrit), insulte publiquement une développeuse et propose une “journée de fierté hétérosexuelle”, précisant que ses opposants “méritent d’être abattus”. Il s’en prend aussi à la communauté transgenre, assimilant la transidentité à un trouble mental.

Sur le plan politique, il relaie des théories complotistes comme QAnon ou Pizzagate, dénonce un “agenda contre les hommes blancs” et qualifie la gauche de “maléfique”. Bref, en quelques années, le “père de Minecraft” devient une figure polarisante que beaucoup préfèrent éviter.

Mojang efface les traces

Chez Mojang et Microsoft, on a vite compris que continuer à afficher son nom posait problème. En mars 2019, une mise à jour supprime toute mention de Notch de l’écran titre du jeu. Il reste dans les crédits, en petits caractères, mais c’est tout. Lors des dix ans de Minecraft, il est exclu des festivités. Microsoft prend soin de préciser que ses propos “ne reflètent pas” la vision de l’entreprise. Depuis, silence radio : pas un communiqué, pas une apparition publique en lien avec le jeu.

Un héritage embarrassant

Aujourd’hui, Markus Persson appartient surtout à l’histoire de Minecraft, pas à son présent. Mojang et Microsoft ont clairement choisi de couper les liens publics avec son image, et il est difficile d’imaginer un retour en arrière. Le jeu prospère, porté par ses mises à jour régulières et sa communauté, sans qu’il soit nécessaire de rappeler en permanence le nom de son créateur.

Notez cet article